Combien je me paye? Partie 2

Qui décide combien je me paye?

Dans le contexte d’un propriétaire unique, la question ne se pose même pas, l’entrepreneur a toute la latitude de s’octroyer le salaire qu’il considère adéquat en fonction de la capacité à payer de l’entreprise et de ses besoins personnels. Mais dans le cas d’une entreprise avec d’autres associés ou avec des actionnaires externes, l’entrepreneur doit justifier ses décisions, dont la question salariale. C’est assez délicat puisqu’on choisit la voie de l’entrepreneuriat pour se libérer du patronat, et là, on se retrouve avec des comptes à rendre. De plus, entre associés, qui décide le salaire de qui?

La question d’équité est aussi un enjeu important car ce qui peut être perçu comme équitable par l’un peut ne pas l’être pour l’autre. Ainsi, je dirais qu’avant tout c’est vous qui êtes le mieux placé pour prendre la décision salariale : si vous avez travaillé dans votre organisation sans vous salarier pendant des années et que vous avez démontré que vous avez à cœur la pérennité de l’entreprise en réinvestissant des profits et que vous cautionnez toutes les dettes de l’entreprise vous-mêmes, je crois que votre jugement sur la question ne devrait pas être mis en doute par quiconque.

En fait, vous serez sans doute moins généreux envers vous-même que votre valeur sur le marché de l’emploi car il est difficile de prendre de votre bébé (l’entreprise que vous avez démarrée) à qui vous avez tout donné pour qu’il se déploie.

La meilleure façon de se payer

L’entrepreneur est aussi actionnaire, ce qui implique que celui-ci a le privilège de pouvoir se verser des dividendes de sa société. Il importe d’être adéquatement conseillé car le choix de rémunération peut avoir un impact important, autant pour vous que pour votre société.

Il y a des implications fiscales de se verser un salaire versus des dividendes ainsi que d’autres facteurs que vous devriez prendre en considération. Dans mon cas, j’ai commis l’erreur de ne pas prévoir une catégorie de dividendes différentes pour me rémunérer sans devoir verser des dividendes aux autres actionnaires.

Lorsque j’étais la seule actionnaire cela ne posait pas un problème mais après les choses se sont compliquées… Néanmoins, voici les grandes lignes à considérer :

Si vous optez de vous verser un salaire, voici les implications :

  • Au niveau de l’entreprise

Le salaire versé par votre société est considéré comme une dépense déductible aux fins de l’impôt pour la société et diminuera donc le revenu imposable de celle-ci. D’autre part, la société encourra une dépense additionnelle, sous forme de cotisations sociales, lorsqu’un versement salarial est effectué. Également, le salaire versé par la société sera assujetti aux retenues à la source d’impôts.

  • Au niveau individuel

Le montant brut de revenu salarial (avant les déductions à la source) constitue un revenu d’emploi et est assujetti à l’impôt à votre taux marginal d’impôt dans l’année au cours de laquelle le revenu est reçu. Vous pourriez peut-être vous prévaloir de certains crédits d’impôt non remboursables en plus d’un montant personnel d’exemption de base. Aussi, un salaire de 151 278 $ en 2019 permet d’effectuer la cotisation maximale de 27 230 $ au REER en 2020, alors que le revenu de dividende n’entre pas dans le « revenu gagné » qui sert a l’établissement des droits de cotisation au REER. Néanmoins, les cotisations à un REER sont déductibles de tout type de revenu incluant le revenu de dividendes. Le revenu tiré d’un salaire est considéré comme un revenu ouvrant droit à pension, aux fins du RPC/RRQ, contrairement au revenu de dividende. Un salaire de 57 400 $ en 2019 permet de maximiser la participation à la RRQ. Les prestations découlant de ce régime (retraite, invalidité et décès) ont une valeur.

Le versement d’un salaire vous permettrait d’être éligible à la création d’un régime de retraite individuel (RRI), soit un régime de retraite à prestations déterminées établi par la société pour un individu.

Si vous versez des dividendes en guise de rémunération ou de complément à votre rémunération, voici ce que cela implique :

  • Au niveau de l’entreprise

Un paiement de dividende n’est pas une dépense déductible pour la société.

  • Au niveau individuel

Le paiement de dividendes occasionne le versement d’acomptes provisionnels. En plus du montant personnel de base, vous seriez admissible à un crédit d’impôt pour dividende non remboursable.

Évidemment, les variables sont nombreuses et chaque situation est unique. Il faut prendre en compte la performance financière de l’entreprise, la composition de l’actionnariat et la situation personnelle de l’entrepreneur. L’implication d’un conseiller financier est souhaitable pour tirer profit au maximum des options qui s’offrent à l’entrepreneur.

Combien je me paye?

Et moi, combien je me paye? Je vous le dirais bien mais je ne le sais pas encore, ça va dépendre de la performance financière de l’entreprise et des investissements projetés pour 2020. Donc je ne le saurai pas avant le printemps 2020, suite à la production des états financiers annuels, combien je vais me payer au total en salaires/bonification pour l’exercice financier en cours et si je vais me verser des dividendes. Espérons de bons résultats!

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