En tant qu’entrepreneur, on sera confronté de différentes manières à la question salariale, tant du point de vue psychologique qu’opérationnel. Selon le stade de développement de l’entreprise, les réalités financières imposeront rapidement des contraintes. L’entrepreneur devra faire preuve de jugement et de diligence pour ne pas fragiliser son entreprise en se rémunérant de façon disproportionnée à la capacité financière de l’entreprise. Puis vient la question de savoir de quelle manière le salaire du dirigeant va progresser au fur et à mesure que l’entreprise se développe, notamment avec l’arrivée potentielle de nouveaux intervenants dans l’équation (employés cadres, actionnaires externes, etc.).
Enfin, l’entrepreneur peut-il se rembourser les dettes salariales du passé, comment peut-il évaluer la valeur de sa contribution de façon objective et comment peut-il maximiser les avantages de son statut d’actionnaire? Le sujet vous intéresse? Lisez bien ce qui suit…
Quand on a le luxe de se payer
Le premier enjeu du parcours de l’entrepreneur est de savoir si et quand il sera en mesure de dégager un salaire des activités de son entreprise. Surtout, il doit bien évaluer ses besoins financiers personnels pour déterminer pour combien de temps il peut composer sans salaire ou encore quel sera le salaire minimum dont il aura besoin pour rencontrer ses obligations financières. Évidemment, si on démarre son entreprise après ses études universitaires et qu’on habite chez nos parents les besoins ne seront pas les mêmes que si on a déjà une hypothèque et une jeune famille à nourrir.
Néanmoins, la réalité est la même pour plusieurs et les enjeux bien réels : l’entreprise n’aura peut-être pas la solidité financière nécessaire pour vous payer avant quelques années et parfois pendant plus longtemps que vous ne l’avez anticipé. Il faut donc prévoir le coup car vous devrez peut-être consacrer toutes les ressources financières au démarrage puis à la croissance des activités qui s’en suivra, ou à l’embauche de vos premiers employés.
Bref, vous devez vous assurez que l’entreprise prend solidement son envol avant d’entrevoir la question de votre valeur financière sur le marché du travail…
Quand on a pas d’autre choix que de se payer
À un certain point, le premier chèque de paye doit arriver, soit parce que vous avez épuisé tous les autres coussins ou parce que les profits générés vous permettent enfin de vous dégager un salaire. C’est une étape charnière mais vous ne serez pas pour autant nécessairement salarié car vous allez peut-être simplement vous verser des dividendes, ce qui coûtera moins cher à l’entreprise.
Dans mon cas, j’ai commencé à me verser un maigre salaire sous forme de dividendes deux ans après avoir démarré officiellement les activités de mon entreprise, une fois que j’avais épuisé toutes mes réserves. Cela a rapidement augmenté la cadence des dépenses de l’entreprise et il fallait que les revenus suivent et que les ventes réalisées soient d’autant plus rentables… Ce qui n’était pas mon cas, et j’ai commencé à perdre de l’argent, plus d’argent qu’avant de me verser un salaire.
C’est là le fardeau et la réalité, on est vraiment conscientisé de l’impact de nos décisions sur la viabilité de notre entreprise. Ironiquement, le fondateur est la personne clé de l’entreprise et du point de vue méritoire, il est évident que cette personne devrait bénéficier d’une rémunération adéquate mais la réalité c’est que sa contribution ne sera pas reconnue avant un certain laps de temps. On présume qu’il parviendra un jour au stade où il sera en mesure de se rémunérer : là je ne parle pas d’une rémunération adéquate, simplement de s’octroyer un salaire, tout court.
Le salaire est perçu comme un revenu du point de vue personnel mais comme une dépense du point de vue professionnel, c’est une dualité que le dirigeant devra apprendre à concilier avec doigté. Ceux qui n’y parviennent pas peuvent rapidement causer la faillite de leur entreprise.
L’évolution des salaires de l’entrepreneur
La perception populaire c’est que l’entrepreneur fait beaucoup d’argent et qu’il est actionnaire d’un actif qui a sans doute une très grande valeur. Non seulement j’ai constaté dans mon expérience personnelle que les gens ont tendance à beaucoup surévaluer le chiffre d’affaire et la valeur des entreprises, mais aussi qu’ils sous-estiment la difficulté que l’entrepreneur peut avoir à se rémunérer. Pourtant, l’entrepreneur peut vivre au seuil de la pauvreté… pendant longtemps avant de voir son entreprise se déployer ou avant d’abandonner et d’aller se chercher un emploi stable qui paye mieux!
Clairement, c’est le jour de la vente de son entreprise que l’entrepreneur espère sortir financièrement gagnant de son aventure. Mais il n’y a aucune garantie que ce jour-là viendra et que la valorisation attribuée sera à la hauteur de ses espérances. Là c’est un autre sujet que j’aborderai dans un prochain article, la valorisation d’une petite entreprise, la VRAIE valeur d’une entreprise.
Alors que pendant des années il a dû sacrifier sa rémunération au profit de sa société, une fois que l’entrepreneur commence à voir les profits s’accumuler sur la ligne du bas, comment doit-il entrevoir sa rémunération? J’ai moi-même senti beaucoup de culpabilité à me payer, d’autant plus que je recevais des demandes de hausses de salaires de mes collaborateurs qui se sentaient sous-payés. Personne ne se préoccupait que je me verse un salaire… à part moi. On ne me disait pas que c’était à mon tour, que là je méritais de me payer adéquatement… jusqu’au jour où j’ai rencontré mon Ange financier qui a voulu que j’en fasse une priorité.
Par la suite, lorsque les années passent et les profits s’accumulent, il faut envisager une croissance du salaire mais celle-ci sera le reflet de plusieurs facteurs, dont l’implication des collaborateurs dans la décision… ce qui nous amène au prochain point qui sera traité dans la deuxième partie de cet article.